Le passage de l’école dentaire à la pratique professionnelle peut être une période stimulante mais aussi éprouvante. Plusieurs nouveaux dentistes rapportent être préoccupés par la probabilité d’une accusation de faute professionnelle et être incertains du rôle que joue l’assurance dans la protection de leur carrière et de leur avenir financier. Au Canada, la définition de la faute professionnelle dentaire varie selon la réglementation des provinces. De façon générale, il s’agit d’un manquement à fournir un niveau de soins standard à un patient, entraînant un préjudice ou une blessure1.
Pour faire la lumière sur les stratégies de gestion des risques et sur l’assurance responsabilité civile professionnelle, nous nous sommes entretenus avec Julie Berthiaume, conseillère principale au CDSPI Services consultatifs Inc. Ses vastes connaissances et son expérience approfondie en matière de conseil aux nouveaux dentistes font d’elle le guide idéal pour explorer le monde de la faute professionnelle.
Quand un incident mineur devient un problème majeur
« La plupart des nouveaux dentistes sont au fait des types d’interactions avec les patients pouvant entraîner une poursuite pour faute professionnelle », estime Julie. « Cependant, ils sont souvent surpris lorsque je leur donne certains exemples réels. Si les cas les plus graves, où un patient meurt ou est gravement blessé, font la une des journaux, il arrive aussi qu’un incident considéré comme mineur se transforme en un problème majeur. »
Voici quelques exemples de pratiques et de procédures courantes qui pourraient donner lieu à une poursuite pour faute professionnelle :
- Une restauration défectueuse qui nécessite des procédures correctives
- Un appareil dentaire défectueux ou mal ajusté qui cause de la douleur ou de l’inconfort
- Des complications liées à l’extraction des dents de sagesse ou à un traitement de canal
- Une blessure aux lèvres, à la langue ou à la mâchoire à la suite d’une intervention
- L’extraction de la mauvaise dent
- Une blessure résultant d’une erreur d’anesthésie
« J’aime rappeler aux nouveaux dentistes qu’en tant que praticiens agréés, ils sont légalement responsables des services fournis par leur personnel et eux-mêmes », explique Julie. « Il est essentiel qu’ils sachent que même un incident apparemment mineur peut entraîner une poursuite pour faute professionnelle. Ainsi, ils doivent rester vigilants et adopter de bonnes habitudes en matière de gestion des risques. »
Rester attentif aux signes avant-coureurs d’une plainte
Pour rester vigilant, il faut notamment reconnaître les signes avant-coureurs d’une poursuite pour faute professionnelle afin de prévenir les risques. Julie suggère aux dentistes et à leur personnel d’être attentifs à certains indicateurs communs :
- Les plaintes continues ou croissantes, l’insatisfaction ou les critiques négatives en ligne concernant la qualité des soins, les résultats des traitements ou la communication, qui peuvent indiquer des problèmes sous-jacents. En répondant avec rapidité et professionnalisme aux préoccupations des patients, il est possible d’éviter que le mécontentement ne dégénère en poursuite judiciaire.
- Le signalement d’une communication inadéquate en ce qui concerne les plans de traitement, par exemple à propos des risques, des bienfaits et des différentes options, qui peut occasionner des malentendus et des litiges. Les patients doivent être pleinement informés et avoir la possibilité de poser des questions afin de donner leur consentement éclairé.
- Les patients qui ont des attentes irréalistes quant aux résultats du traitement ou qui estiment qu’on n’a pas répondu à leurs attentes. Il est essentiel de fixer des attentes claires et réalistes par le biais d’une communication efficace.
- Les préoccupations ou les différends irrésolus, qui peuvent s’aggraver. Le fait de s’occuper des problèmes rapidement et de manière professionnelle permet souvent d’éviter davantage de complications.
- Plusieurs incidents similaires de plaintes ou de problèmes, qui peuvent indiquer des problèmes systémiques au sein d’un cabinet. Identifier les causes structurelles et les traiter peut contribuer à prévenir de futures plaintes.
- Les patients qui signalent des soins de suivi inadéquats ou une mauvaise évaluation des progrès après les interventions, car cela peut causer des complications.
Julie souligne l’importance d’être proactif en matière de communication avec les patients et de veiller à ce que le personnel soit formé pour reconnaître ces signaux d’alerte. Le personnel clinique et administratif devrait être habilité à maintenir une bonne communication avec les patients ainsi qu’à utiliser les outils en place pour consigner et partager les commentaires ou les préoccupations des patients.
Comprendre le rôle d’une documentation détaillée
Selon Julie, on ne saurait trop insister sur le rôle que joue une documentation rigoureuse et soignée dans l’atténuation des risques de faute professionnelle. « Les nouveaux dentistes ne pensent pas toujours à l’importance d’un dossier clair et lisible au moment de le remplir, alors qu’il sera un élément de preuve essentiel pour se défendre en cas de plainte pour faute professionnelle », déclare-t-elle. « Les fiches de traitement dentaire et les dossiers de patients sont d’une importance capitale, car ils deviennent des preuves concrètes lors d’un procès. Ainsi, les dentistes doivent être proactifs à ce sujet et insister pour que leur personnel fasse de même », explique-t-elle. « Si les dossiers ou les autres notes ne sont pas clairement lisibles, leur valeur en tant que preuve peut être compromise. Ainsi, il convient d’éviter l’emploi d’abréviations, d’acronymes ou d’autre jargon qui pourrait ne pas être compris de tous. Même avec des dossiers informatisés, il faut s’assurer que les saisies de données sont complètes et compréhensibles. »
Julie met en garde les nouveaux dentistes contre la modification ou la suppression d’informations dans un dossier, car cela pourrait soulever des questions et nuire à leur crédibilité. En fait, les notes ne devraient pas être rouvertes après le signalement d’un incident, car cette activité peut être découverte ultérieurement lors d’une enquête de vérification judiciaire. Même s’il n’y a pas d’intention de modifier le document, les métadonnées pourraient être interprétées comme une tentative de dissimuler de l’information. Julie insiste sur l’importance de tout documenter en détail et de demander conseil à un partenaire de confiance comme le CDSPI lorsqu’un incident se produit. « Les dentistes devraient nous contacter sans délai lorsqu’ils soupçonnent un problème, car nous sommes là pour les guider tout au long du processus. Il n’y a pas d’inconvénient à le faire. Leurs primes n’augmenteront pas parce qu’ils nous ont parlé d’un sinistre potentiel. »
Elle rappelle que le CDSPI apporte son soutien et son expertise aux dentistes pour les aider à surmonter les difficultés liées à la faute professionnelle.
Le rôle de l’assurance responsabilité civile professionnelle
Bien qu’il existe des moyens efficaces de gérer la possibilité de faute professionnelle, comme la connaissance des types d’incidents à risque, l’attention aux signes avant-coureurs comme une plainte et la tenue rigoureuse des dossiers, une poursuite peut tout de même se produire. Lorsqu’elle conseille les nouveaux dentistes, Julie estime qu’il est important d’être réaliste. « Peu importe la prudence dont nous faisons preuve, des accidents peuvent se produire. J’explique aux nouveaux dentistes que l’assurance responsabilité civile professionnelle est là pour les défendre, leur entreprise et eux. » En effet, les accusations de faute professionnelle, même si elles ne sont pas fondées, peuvent avoir des conséquences financières importantes et nuire à la réputation des dentistes.
Julie insiste sur la nécessité pour les dentistes confrontés à ce type d’accusation d’être prêts à se défendre. « Les frais de justice peuvent s’accumuler rapidement et devenir une charge importante qui nuit à la santé financière », explique-t-elle. « Le fait de disposer d’une couverture adéquate en matière d’assurance responsabilité civile professionnelle contribue à alléger ce fardeau. »
Le choix du montant approprié de la couverture pour faute professionnelle est une décision clé pour les dentistes. Bien que la couverture minimale offerte par l’assurance RC professionnelle du CDSPI soit de 3 millions $, Julie insiste sur le fait qu’il n’existe pas de solution unique. Chaque dentiste doit tenir compte de facteurs comme sa spécialisation, la pratique d’interventions chirurgicales et le recours à la sédation intraveineuse. Elle encourage les dentistes à envisager les pires scénarios et à évaluer leur zone de confort personnelle lorsqu’ils choisissent le montant de leur couverture.
« Je leur dis de considérer les risques auxquels ils peuvent être confrontés dans leur pratique et de les mettre en balance avec l’impact financier de couvertures plus élevées. Cette conversation est parfois difficile, mais elle est essentielle pour les amener à réfléchir aux risques. » Surtout, Julie rassure les dentistes sur le fait qu’il est possible d’ajuster leur couverture en fonction de leurs besoins tout au long de leur carrière. « Le coût supplémentaire lié au passage d’une limite de 3 millions $ à 5 millions $ par sinistre est d’environ 110 $ par an », souligne-t-elle, « et cela sur la base d’une franchise de 1 000 $. »
Les conséquences d’une poursuite pour faute professionnelle ne se limitent pas à leur impact financier
Si les conséquences financières d’une poursuite pour faute professionnelle sont considérables, il ne faut pas négliger l’impact sur la santé mentale du dentiste. Cette expérience souvent difficile sur le plan émotionnel peut être psychologiquement dévastatrice. Le processus de gestion d’un cas de faute professionnelle, incluant les procédures judiciaires, les enquêtes et autres incertitudes, peut entraîner des niveaux élevés de stress et d’anxiété. Les dentistes peuvent également éprouver des sentiments de culpabilité et de honte, en particulier s’ils pensent avoir commis une erreur ayant causé un préjudice à un patient. Ces émotions peuvent être accablantes et conduire à la culpabilité ainsi qu’à une perception négative de soi. Ce type d’incertitude et de stress prolongé peut contribuer à un sentiment de dépression, à une tristesse persistante, à un manque d’intérêt pour les activités et à un sentiment de désespoir face à la situation. Les dentistes visés par une action pour faute professionnelle peuvent se sentir isolés et éloignés de leurs collègues, de leurs amis et même des membres de leur famille.
Une poursuite pour faute professionnelle peut également ébranler la confiance d’un dentiste en ses compétences cliniques et en sa capacité à prendre des décisions. Cela peut l’entraîner à se remettre en question et à devenir hésitant dans sa pratique, causant une perte d’assurance. Le dentiste peut développer une image négative de lui-même et se percevoir comme un professionnel inadéquat. Cette perception déformée de soi peut contribuer à des problèmes de santé mentale. Pour certains, l’expérience d’une accusation de faute professionnelle peut être traumatisante. La menace qui pèse sur leur carrière et leur réputation, associée aux défis juridiques et émotionnels, peut entraîner des symptômes de traumatisme, notamment des flash-backs, des cauchemars et de l’hypervigilance.2
Il est important que les dentistes confrontés à une accusation de faute professionnelle accordent la priorité à leur santé mentale et recherchent du soutien. Le contact avec un professionnel de la santé mentale, comme un thérapeute ou un conseiller, peut offrir un espace sûr pour partager ses émotions et développer des stratégies d’adaptation. Le programme d’assistance aux membres (PAM), parrainé par le CDSPI et sans frais pour les membres des associations dentaires participantes, offre des services de conseil confidentiels, des ressources en matière de bien-être et un soutien aux dentistes dans leur vie professionnelle et personnelle. En outre, sans divulguer le contenu d’une affaire judiciaire, la recherche de conseils auprès de pairs, de mentors et d’organisations professionnelles peut aider les dentistes à surmonter les conséquences psychologiques d’une poursuite pour faute professionnelle et à travailler à la guérison et au rétablissement.
Souscrire une assurance responsabilité civile professionnelle
Il ne fait aucun doute que les nouveaux dentistes ont un emploi du temps chargé. Faire des recherches sur la couverture et les conditions d’une assurance n’est pas toujours une priorité. Lorsqu’elle conseille de nouveaux dentistes, Julie débute ses rencontres en présentant les options offertes au Canada. « En Alberta et en Ontario », explique-t-elle, « une couverture d’une limite standard de 2 millions $ est assurée par les organismes provinciaux de réglementation. Toutefois, les dentistes de ces provinces peuvent opter pour une protection plus importante en souscrivant l’assurance RC professionnelle excédentaire du CDSPI. »
Pour les dentistes qui exercent en dehors de l’Alberta et de l’Ontario, le CDSPI est le principal fournisseur d’assurance responsabilité civile professionnelle. « J’insiste toujours auprès des étudiants sur le fait qu’ils devraient demander une assurance responsabilité civile professionnelle en même temps que leur permis d’exercice », nous dit Julie. « Cette procédure peut être compliquée, mais le CDSPI est là pour les aider à tout coordonner. » Elle recommande aux nouveaux dentistes de bien réfléchir à leurs projets et à leur échéancier, car l’obtention du permis déclenche l’obligation de souscrire une assurance responsabilité civile professionnelle, qu’ils aient commencé à exercer ou non. « C’est le moment idéal pour contacter le CDSPI. »
Envisager l’avenir avec confiance
Le passage de l’école dentaire à la pratique professionnelle est rempli d’excitation et de défis, tout en venant avec la responsabilité de protéger sa carrière. Il est crucial que les nouveaux dentistes commencent à acquérir les outils et les conseils dont ils ont besoin pour protéger leur avenir financier et leurs patients. Grâce aux conseils d’experts comme Julie Berthiaume et aux ressources offertes par des organisations comme le CDSPI, les nouveaux dentistes peuvent s’équiper pour saisir les opportunités et surmonter les défis qui les attendent.
En choisissant une couverture d’assurance responsabilité civile professionnelle appropriée et en accordant la priorité à une documentation rigoureuse, les professionnels dentaires peuvent s’engager en toute confiance dans une carrière prospère et épanouissante.
1 Pour une définition détaillée de la faute professionnelle dentaire, veuillez vous référer à votre association provinciale ou à votre ordre professionnel.
2 Nancy A. Ryll, Living Through Litigation: Malpractice Stress Syndrome, Journal of Radiology Nursing, Volume 34, Issue 1, 2015, Pages 35-38.
L’assurance responsabilité civile professionnelle et l’assurance responsabilité civile professionnelle excédentaire du CDSPI sont souscrites par Zurich Compagnie d’assurances SA (Direction canadienne) et fournissent une protection qui est assujettie aux modalités régissant chaque contrat. L’assurance RC professionnelle excédentaire est offerte aux dentistes qui sont autorisés à exercer en Alberta et en Ontario, qui sont membres de leur association dentaire provinciale et qui ont souscrit l’assurance RC professionnelle en première ligne obligatoire directement auprès de leur organisme de réglementation provincial. Il s’agit uniquement d’une description générale de certains types de protection d’assurance offerts aux clients qui y ont droit par l’entremise de Zurich Compagnie d’assurances SA (Direction canadienne). Rien de ce qui est contenu ici ne doit être interprété comme une sollicitation, une offre, des conseils, une recommandation ou tout autre service concernant un type de produit d’assurance souscrit par Zurich Compagnie d’assurances SA (Direction canadienne). Les modalités de votre police d’assurance constituent le contrat qui décrit de manière complète et précise votre protection d’assurance. La description des dispositions de la police contenue dans la présente lettre fournie un aperçu général de la protection d’assurance à titre d’information seulement, et ne vise pas à réviser ni à modifier les modalités de la police.